Art & Design

ENSA Dijon

10.04.2013

Conférence

Judicaël Lavrador

11h • Amphithéâtre

Le portrait gâché

On pourrait appeler cela le portrait gâché, qui n’est pas du tout le portrait craché, mais pas non plus un portrait raté. Il pourrait être plutôt un portrait gâté, comme on dit d’un fruit trop mûr et comme l’a rêvé Dorian Gray, héros cynique du roman d’Oscar Wilde. Par là, il a quelque chose de plus vrai, de plus fidèle que le plus fidèle des portraits : il matérialise le travail du temps qui passe. « Qu’est-ce que c’est que se faire tirer le portrait, écrivait Nicole au XVIIe siècle, sinon désirer perpétuer la représentation de notre visage, c’est-à-dire vouloir nous faire vivre dans un tableau en un temps où ce visage a déjà reçu de grandes impressions de notre moralité et sera bientôt rongé par les vers ?». Or, de nombreux peintres contemporains ne visent plus dans leurs portraits à donner une image ressemblante du modèle. Ni même d’ailleurs à lui prêter le moindre visage. La peinture recouvre, estompe, maquille les traits des personnages. Au lieu de les esquisser, elle les lessive, les entarte ou les floute. Ce qui nous fait dire ça : quand la peinture dé-visage ses modèles, c’est elle-même que rongent les vers. Ne dit-on pas que la peinture est morte ? Alors, mercredi 10 avril, entre 11h et 13h, on va faire son deuil.
Judicaël Lavrador

Judicaël Lavrador est critique d’art. Il écrit pour Beaux-arts Magazine et Les Inrockuptibles. Il enseigne l’histoire de l’art contemporain à l’École des Beaux-arts de Lyon et intervient à l’École des Beaux-arts de Montpellier. Il est l’auteur de Qu’est-ce que la peinture aujourd’hui ? (Beaux-arts éditions, 2008) et le commissaire du Prix Ricard en 2009.

Conférence proposée par Carlos Castillo.

En priorité destinées aux étudiants et enseignants de l’école, les conférences sont ouvertes au public dans la limite des places disponibles.

 

David Hemmings dans Profondo Rosso,réalisé par Dario ,Argento, 1975